Nouvelle ère, nouveau départ... {Kaorihime April} [Terminé]

Le vent soufflait contre le visage impassible de la gamine, assise sur son séant depuis près d’une heure à contempler l’ombre et la lumière qui s’enchevêtraient harmonieusement pour former un ciel décoloré par la nuit tombante. Coite malgré toute l’agitation qu’elle ressentait depuis son lieu dans l’unique intérêt d’organiser un événement majeur en vue d’accueillir leur nouveau Capitaine comme il se doit, ce regroupement ne l’avait guère enchanté lorsque le mot passa accidentellement par son oreille et c’est pour cette raison particulièrement qu’elle n’avait pas bougé d’un pouce depuis la matinée. Les efforts déployés par toute son équipe dans l’unique but d’organiser un accueil digne de son titre, événement qu’elle aurait bien aimé s’en passer mais qui malheureusement arriva inopinément, étaient réellement appréciés mais que très peu nécessaire à ses yeux. De toute évidence, elle se voyait mal les sermonner à cause de leur impétueuse envie de célébrer. C’est donc en feignant ne pas être au courant de ce préambule qu’elle s’installa à un endroit calme en vue de voir passer sa journée en toute tranquillité, se préparant mentalement à l’accueil qui risquerait inéluctablement d’être bruyant. Elle ne portait pas ces festivités à cœur mais si cette petite fête pouvait remonter le moral de la troupe, alors soit, elle allait se préparer à jouer un peu la comédie et à apprécier tout ce spectacle, uniquement parce que la réussite de sa division représentait l’une de ses impérieuses priorités. Pour le peu de positivisme qu’il pouvait y avoir dans cette prochaine entrée en matière, elle ne pouvait tout simplement pas s’y opposer à vive voix. Et puis ce n’était pas comme si la nouvelle pouvait ne pas être répandue. Le vent soufflait loin et fort et l’arrivée d’une Taisho devenait inévitablement une rumeur qui courrait particulièrement vite.

Au moins pourra-t-elle se vanter d’avoir pu garder sa nomination secrète pendant au moins une journée avant que quelques grandes bouches ne se laissent influencées par des oreilles attentives et assoiffées de nouvelles histoires à répandre. Il faut dire d’ailleurs que cette nouvelle pouvait brimer l’humeur de certains qui convoitaient son poste comme un trésorier ambitionnait sur l’or. Apprendre du jour au lendemain qu’une promotion avait lieu et que l’un des plus grands titres de toute la Soul Society venait d’être occupé par une gamine à peine arrivée sur les lieux ne pouvait que raviver des flammes qui se transformeront peu à peu en brasier. Elle devait rester prudente et c’est pour cette raison en quelque sorte qu’elle ne voulait prétendre être satisfaite et méritante de son titre ce qui ne ferait qu’empourprer de nombreux visages amicaux dont les liens ne feront que s’étirer peu à peu au point de se rompre définitivement. Bien qu’elle soit consentante et fière d’arborer la fameuse cape blanche aux reliefs noirâtres sur ses épaules, elle n’en restait pas moins humble, mais pour combien de temps encore. Déjà qu’à peine la parure dont le signe de sa division était clairement indiquée endossée, elle avait eu le droit à quelques insultes et rigolades à l’égard de certains jaloux à cause de la taille excessive du tissu pour son gabarit de modeste envergure. Il n’en serait donc pas surprenant qu’April se laisse influencer par ces mauvais regards et délierait sans retenue sa petite langue fourchue en vue d’en baver plus d’un. Ces avides personnages ne méritaient que cela après tout et s’il fallait croiser son trancheur d’âme à celui d’un rival pour démontrer ses réelles habiletés, ce ne sera pas la couardise propre à des enfants qu’on comparait souvent à elle qui allait le lui empêcher. Son professionnalisme lui éviterait de se retenir face à une provocation directe et quoi de mieux qu’une altercation pour être vue à sa juste valeur ? Rien, effectivement.

Mais elle le méritait, la gamine en était plus que consciente. Même si son arrivée n’avait pas été marquée et que son éducation n’était pas autant parsemée d’exploits que de mentions, elle savait qu’elle avait su forger sa place au sein de cette société et cela malgré toutes les embûches qui ont entravé sa route dans l’unique but de la nuire dans l’apothéose de sa vie spirituelle. Le labeur avait été extrêmement dur mais en observant la cape immaculée qu’elle portait présentement, un vague sourire nostalgique se dessina sur ses traits impassibles tandis que des souvenirs refluaient dans son esprit pour lui rappeler combien de force il lui aura fallu pour en arriver là. Personne maintenant ne pourra s’arroger le droit de la mésestimer ou de se moquer d’elle puisque son titre confirmera immédiatement sa réussite à l’accession de l’apex tant convoité de sa carrière Shinigami. Et si un fou osait tout de même entraver sa route désormais bien battue qui menait à la réalisation de ses ambitions, alors qu’il en paie tout simplement le prix. Personne ne pourra s’opposer à la décision du Commandant de nominer la jeune April, elle-même, en tant que Go Ban Tai Taisho et ce verdict était loin d’être un coup de tête sinon quoi elle n’aurait pas eu le temps de jouir autant de son tout nouveau poste qu’elle en aurait été inévitablement démise quelques secondes après. Ce rang était permanent et elle devait tout simplement se montrer à la hauteur des attentes de tous.

C’est lorsque la lune toucha son apogée que la récente promue se leva de son séant et se dirigea d’un pas calme vers les portes qui ouvriraient d’ici peu sur un univers de réjouissances qui ne la mettraient – du moins elle l’espérait – pas trop mal à l’aise. Il lui aura fallu au moins toute la journée pour se préparer à d’éventuelles acclamations. Après quelques inspirations devant les grandes portes de marbres ornées par des fioritures sculptées à même le matériel, elle les poussa d’un grand geste au complet alors que malgré toute sa volonté, les battants ne contredire pas son action. Elle aurait souhaité rester prisonnière des ténèbres de cette nuit dans l’unique intention de fuir ce qui l’attendait à l’intérieur mais rien de ses souhaits ne furent réaliser. À croire que son destin la poussait irréfutablement vers l’inattendu et l’inévitable sans aucune compassion. Dès l’ouverture suffisamment grande pour laisser passer ses 45kg à l’intérieur de la grande salle fraîchement redécorée pour l’occasion, elle remarqua bien vite la pléiade de regards attirés par son arrivée anticipée. Et comme si elle avait parut d’un Menos aux yeux de ses hôtes, la plupart des expressions se raidirent d’étonnement à la vue de sa petite silhouette qui ne dépassait pas les 1m45. En contraste avec cet accueil des plus froids, une vague d’acclamations retentit d’elle-ne-savait où, ce qui ne s’agençait absolument pas aux attentes que s’étaient forgées sa division à l’égard de leur Capitaine. Il était évident que son profil-type ne concordait pas avec les autres Taicho qui, s’ils n’étaient pas de forte stature, avait de belles formes incommensurables et un corps élancé qui savaient plaire à tout un personnel. Pour sa part, avec comme poitrine quelque chose d’un peu généreux pour son apparence de jeune fille, seuls ses cheveux pouvaient la distinguer du bas de gamme, mais sa perruque ne saurait néanmoins pas satisfaire les jouvenceaux à la recherche d’une compagne. En fait, elle était loin de la superbe fille sexy dont espérait tant quelques recrues présentes pour l’événement et elle se rendait compte que son apparence en décevait plus d’un.

Ø … Salut ! cria-t-elle d’un ton guère contrôlé qui sonna excessivement trop gai.

Puis elle leva une main qu’elle agita nerveusement dans les airs en guise de salutation, un large sourire venant fendre ses traits qui, une seconde plus tôt, représentaient ce que l’on connaissait de plus stoïque dans le monde spirituel. L’attitude qu’elle emprunta durant quelques secondes était loin de lui ressembler et certains, plus observateurs que d’autres, avaient du se rendre compte du manque d’aisance à agir de la sorte. Il était même évident que rien de ses fausses émotions n’étaient dosées puisqu’il y avait plus de bonheur à voir ses pairs que d’étonnement à constater toutes les préparations pour cette nuit qui s’annonçait des plus anormales. Les applaudissements s’estompèrent graduellement pour faire place à un silence pesant tandis que la Taisho observait les alentours à la recherche d’une échappatoire possible à cette lourde atmosphère embarrassante. Le silence moqueur s'instaura instinctivement dès les chuchotements tus puis le vacarme des lourdes portes qui se refermaient suite à l'entrée fracassante de la Capitaine vint interrompre pendant un laps court de temps la tranquilité énervante du lieu. Pour une première apparition, il était claire que personne n’aurait pu faire mieux dans le genre original.

Ses trois pommes qui représentaient sa grandeur totale n’étaient rien comparativement au colosse qui se dressa dans toute sa hauteur après sa franche révérence. Loin d’être intimidée par ce géant aux mesures incommensurables, elle était tout de même impressionnée de devoir autant arquer sa tête vers l’arrière pour pouvoir le regarder fixement. Ils représentaient en gros le duo le plus original de toute la Soul Society puisque physiquement, ils étaient complètement l’inverse de l’autre ce qui rendait le tableau farfelu et loin d’être réellement sérieux. Néanmoins, elle s’imagina en train d’intimer des tâches à son auxiliaire qui pourrait être soit son père ou du moins son grand frère. Rien de plus humiliant que de recevoir des ordres d’un plus petit gabarit de soi et bien qu’elle n’ait pas à vivre ce genre de situation puisqu’elle se considérait dans les tailles les plus minimes, il n’en était pas moins qu’il était facile d’échanger sa place avec l’un de ses subalternes. Cette seule pensée n’eut effet que d’approuver les réactions de ses comparses à qui elle se promit d’intervenir dans un discours fraichement préparé en vue de non pas les admonester de leurs comportements, mais plutôt de leur assurer un bon commandement au sein de cette division. Rehausser le morale des troupes faisait partie des tâches importants qu’un Taisho devait accomplir avec soin et c’est ce qu’elle ferait... plus tard. Il était inutile de s’étendre pour l’instant sur ce problème qui fut immédiatement catégorisé dans son tiroir : affaires à régler plus tard. Pour le moment, l’important était de visiter les lieux et de prendre conscience de tout le quartier qui appartenait à son département dans lequel elle évoluera et passera la majeure partie de son temps à l’avenir. Et si elle se fiait sur les acteurs toujours présents dans la place, elle ne pouvait demander à nul autre que ce malabar.

Alors donc le Fukutaisho se présentait sous l’identité de Kojima Kensei. Si son nom fut vite gravé dans sa boite crânienne, elle préféra feindre d’omettre ces « plates excuses » qui effectivement étaient ennuyantes et inutiles. Il n’était pas de son ressort de dicter le comportement adéquat à ses troupes hors des situations de combat et donc, elle ne blâmait absolument pas l’officier de cette telle impuissance. De toute évidence, elle ne pouvait se plaindre de sa situation puisqu’elle rencontrait le second homme le plus important de la division et que cette entrevue allait être prometteuse en vue d’une collaboration incontournable qui ne pourrait qu’être bénéfique sur un champ de bataille. Papoter avec toute une division, même si la découverte des caractères de chacun pouvait être un atout, n’était pas une urgence et elle se donnait amplement le temps pour répondre à ce besoin mineur. Les décisions qu’elle prendrait passeraient inexorablement par son bras-droit avant d’être approuvées et elle était loin du genre à prendre toutes les responsabilités sur son dos. Il était certain que sa façon de travailler plairait énormément à toute sa troupe puisque le travail d’équipe allait harmonieusement de concert avec la réussite et elle en était qu’extrêmement consciente. D’ailleurs, même si elle prônait la réussite de ses missions à toutes autres choses parallèles, elle privatisait toujours la sécurité de ses subalternes dans ses stratagèmes et si le danger était à trop gros risques, alors elle abandonnait vite l’idée. La survie était sur la même marche que la réussite sur ce point.

Ø Mes affaires sont disposées à mes anciens quartiers situés au Seireitei. Néanmoins, je n’aurai pas besoin de votre aide pour cette basse tâche, je demanderai à des amis de disposer mes bagages.

La jeune Capitaine ne souhaitait pas donner cette pénible besogne à son Fukutaisho, persuadée de toute évidence qu’elle finirait bien par trouver un volontaire pour trainer toutes ses besaces à son nouveau lieu résidentiel. Elle était loin de regretter sa piètre chambre au cœur du Seireitei, misérable pour une fille de son rang. A l'époque, elle n’avait pu avoir un meilleur choix que celui-ci et cela allait bientôt faire plus d’un an, jour pour jour, qu’elle logeait en ces lieux. Le miteux endroit allait finalement retrouver le vide parfait dans lequel elle avait décidé de s’installer le temps de trouver mieux, et maintenant que ce soi-disant « meilleur » était apparu, il était clair qu’elle n’allait pas renoncer à une plus confortable demeure. N’étant pas fille de riches et n’ayant jamais goûté à l’aisance d’une luxure sans pareille, elle était impatiente de constater l’allure de ses nouveaux logis, sans compter qu’elle allait avoir un bureau à elle pour veiller à ses tâches administratives. Dire qu’elle occupait maintenant un titre suffisant pour recevoir en prime des pièces pour elle seule, elle avait encore du mal à en croire ses yeux lorsque les portes s’ouvrirent sur les grandes salles qui lui étaient destinées.

C’est à peine si elle s’était préoccupée des autres lieux visités avant de déboucher ici-même. Quelques endroits administratifs appartenant à d’autres sièges de leur division, des bâtiments situés concentrés dans le même lieu afin d’éviter tout déplacement déplaisant, rien de tout cela l’intéressait bien que malgré elle, elle feignait être captivée par cette visite guidée qu’elle avait quémandée avec courtoisie. En fait pour être honnête, le simple fait de voyager à travers ce dédale lui permettra de retrouver facilement son chemin et cela même si elle n’écoutait que d’une oreille distraite ce qui avait été dit. Dès qu’ils s’arrêtèrent près des portes qui dissimulaient derrière les fameuses loges de la Capitaine, April regarda son officier, un léger sourire flottant sur ses lèvres. Elle était reconnaissante envers cet homme qui avait passé par-dessus les préjugés pour lui venir en aide, comme tout bon Fukutaisho se doit d'agir. D’un geste lent mais bien choisi pour ce moment opportun, elle inclina légèrement la tête, les yeux fermés et la paume posée contre son cœur, en guise de reconnaissance, geste qu’on lui avait inculqué lorsqu’elle était mortelle et qui se perpétuait dans sa famille depuis des lustres. Après une si belle marque de gratitude, elle laissa échapper quelques mots en vue de terminer cette rencontre en toute beauté :

Ø Je vous remercie énormément pour cette attention particulière dont vous avez fait preuve. Je vous assure que dès que je me serai habituée aux formalités qu’exige mon poste, je rassemblerai les troupes et je les unirai pour de bon. Je comprends qu’il doit être dur pour vous de constater le comportement de la division à laquelle vous avez donné cœur et âme afin qu’elle fonctionne en toute harmonie, et je vous donne ma parole que je perpétuerai votre travail sur les mêmes vertus afin que la cinquième Division rayonne éternellement.

Et c’est après ce petit discours franc et honnête qu’April tourna les talons et poussa la porte, constatant la beauté et la luxure de l’endroit qui devenait désormais ses quartiers. La vie risquait de se changer pour de bon, mais dans un sens positif qui ne pouvait être que meilleur pour elle… Maintenant, elle avait du pain sur la planche !